JURISPRUDENCE

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

La résidence de l’enfant après séparation des parents

B – Synthèse des motifs utilisés par la Cour d’appel de Montpellier

Dans tous les cas, les magistrats de la Cour d’Appel statuent nécessairement dans l’intérêt supérieur de l’enfant. Cet intérêt est la motivation première de chaque décision. Ainsi, tous les divers motifs évoqués par les juges de la Cour d’appel dans leurs arrêts découlent de l’intérêt de l’enfant. Les juges sont amenés à qualifier l’intérêt supérieur de l’enfant selon un faisceau d’indices concrets.

Ainsi, à la vue des arrêts étudiés, nous pouvons constater que, pour fixer une résidence alternée, la Cour d’appel de Montpellier se fonde principalement sur :

  • Les conditions matérielles offertes par les parents, ainsi que leur disponibilité, à 21 %
  • Le maintien ou le rétablissement des liens entre l’enfant et ses parents, à 14%
  • La communication entre les parents, à 10%
  • La proximité géographique entre les domiciles des parents, à 10%
  • D’autres motifs, tels que la pratique antérieure, l’accord des parents, le souhait de l’enfant, l’unité de la fratrie…

Ces motifs peuvent se cumuler.

Au contraire, pour fixer une résidence principale chez l’un des parents, la Cour d’appel de Montpellier se fonde principalement sur :

  • La défaillance d’un des deux parents (violences, conditions matérielles offertes, indisponibilité…), à 25%
  • La pratique antérieure, la stabilité de l’enfant, à 22%
  • Le manque de communication entre les parents ou le non-respect par l’un des droits de l’autre, à 11 %
  • L’éloignement géographique entre les parents, à 6%
  • L’âge de l’enfant, à 5%
  • D’autres motifs, comme la volonté de l’enfant, l’accord des parents, l’unité de la fratrie…

Nous avons donc pu identifier une grande variété de motifs justifiant les décisions rendues par le juge. La grande variété des justifications est explicable par l’appréciation in concreto que fait le magistrat, c’est-à-dire que celui-ci juge les affaires au cas par cas se prononçant sur les faits versés au débat, il décide selon ce qui lui est soumis concrètement.

Nous pouvons néanmoins identifier certains motifs prépondérants dans les décisions judiciaires. Ainsi, les juges analysent l’intérêt de l’enfant notamment selon sa nécessité d’être maintenu de manière stable dans son environnement, les différences de disponibilité temporelle entre les deux parents au service de l’éducation de leur enfant ou encore l’importance pour les enfants de ne pas ou ne plus être confrontés à la violence de l’un de leur ascendant :

La stabilité environnementale est la nécessité pour certains enfants de rester ancrés dans un schéma de vie rassurant pendant de longues périodes. Certains enfants peuvent mal vivre et manquer de capacité d’adaptation face à un lieu de vie interchangeable à intervalle régulier. Dans les cas de situations qualifiées comme instables, qui créeraient alors un mal-être chez l’enfant, une résidence alternée ne pourra être accordée par le juge.

La disponibilité de chaque parent est un critère important. En effet, même si aucun doute n’est émis sur les capacités éducatives du parent, il est important que celui-ci ait effectivement du temps à consacrer à l’éducation. Il faut donc vérifier, pour déterminer l’attribution de la résidence, si l’un des parents peut avoir une organisation de vie qui lui permettra de consacrer à son enfant tout le temps dont il a besoin.

Les violences physiques et psychologiques envers un enfant nuisent à son développement, à sa sécurité et à son épanouissement. Bien qu’il soit important de maintenir des liens entre les parents et leurs enfants, il est nécessaire de tirer des conséquences des violences qui ont pu être commises par l’adulte. Lorsque c’est le cas, la situation sera examinée concrètement et attentivement, le juge fera prévaloir la sécurité de l’enfant, physique comme affective, face à ce parent. Ainsi, les résidences principales au domicile de l’autre parent seront favorisées, avec l’instauration d’un droit de visite médiatisé, afin de permettre à l’enfant d’évoluer dans son cadre de vie quotidien de manière sereine.

Enfin, le souhait de l’enfant peut parfois être pris en compte. En effet, en vertu de l’article 388-1 du code civil, l’enfant est en droit d’être entendu dans le cadre des décisions le concernant. Les auditions d’enfant sont alors autorisées au regard de la capacité de discernement de chaque enfant. L’audition d’un enfant ne lie toutefois aucunement le magistrat

Pour aller plus loin : « Résidence alternée et intérêts de l’enfant. Regards croisés des magistrats », Dossier AJ Famille 2021, 403.